22/09/10

La Belgique communautaire a vécu

Plus de cent jours après les élections de juin 2010, plus de 1100 jours après les élections de juin 2007, Pro Bruxsel constate que l’attelage institutionnel continue à s’embourber, malgré les efforts courageux et prolongés des négociateurs : quand le sol est meuble, au plus les roues tournent, au plus le véhicule s’enlise.

Cet enlisement était prévisible : la structure actuelle de l’Etat belge est instable et ambiguë. Tout en reconnaissant les Régions (voulues à l’origine par les Wallons) elle fait la part belle aux Communautés linguistiques, auxquelles on a donné pouvoir et territoire (voulus à l’origine par les Flamands). Ce qui devait nécessairement polariser de plus en plus le pays en deux blocs opposés, tout en rendant les institutions de plus en plus complexes, coûteuses, et donc instables.

Depuis la mise en place de ce système boiteux, sa survie a été possible, par petits transferts de compétences successifs, tantôt vers les Régions, tantôt vers les Communautés, dans un cadre où le niveau fédéral gardait malgré tout des compétences importantes. On a pu ainsi temporiser, et se donner de part et d’autre de la frontière linguistique l’impression d’accords acceptables.

Cette évolution rencontre aujourd’hui ses limites : une plus grande décentralisation devient injouable dans un système qui garde la complexe dualité Communauté/Région. A Bruxelles en particulier, qui serait soumise pour sa gestion rapprochée à trois gouvernements distincts disposant sur son territoire de compétences encore accrues, forçant ses habitants au choix d’une sous-nationalité !

Surtout, depuis le début, le jeu est faussé. L’option communautaire a été utilisée par les nationalistes de Flandre comme un moyen stratégique leur permettant de nier ou cogérer Bruxelles, dans l’optique d’une future scission du pays. Les partis du Sud se sont empressés de créer en écho le fantasme d’une « nation francophone » rattachant Bruxelles à la Wallonie.

Pour Pro Bruxsel, la seule façon de sortir de manière durable et honorable de la crise actuelle est de tourner enfin clairement la page du communautarisme belge. En optant pour une structure simplifiée, basée uniquement sur les Régions (Flandre, Wallonie, Bruxelles, et, s’ils le demandent, Région germanophone), il redevient possible d’approfondir l’autonomie régionale (ce qui correspond à une demande démocratique de la Flandre) sans mettre à mal la Région bruxelloise (ce qui correspond à une demande démocratique de ses habitants) ni la (con)fédération belge (ce qui correspond au souhait de la majorité des habitants du pays). Et on peut enfin donner à la Wallonie et à Bruxelles la possibilité d’intégrer chacune dans leurs compétences l’enseignement et la culture, ingrédients essentiels d’un projet régional ambitieux et performant.

A défaut, on laissera en place un communautarisme dépassé, dont les derniers soubresauts seront mortels pour ce pays et sa région centrale.

13/09/10

Pourquoi la Flandre veut contrôler Bruxelles

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La NV-A veut contrôler Bruxelles, mais se fiche de ce que veulent les Bruxellois.

Bart Maddens, politologue très écouté par la NV-A a clairement exposé la vision du parti séparatiste dans une interview parue dans le Tijd du 6 septembre dernier. Il y dit : (traduction libre) « Il est regrettable que les Flamands adoptent une attitude très faible dans le dossier des listes bilingues. Parmi les Bruxellois néerlandophones de plus en plus de voix s’élèvent pour dépasser les clivages institutionnels entre francophones et néerlandophones. Les jeunes générations de Bruxellois flamands s’identifient de plus en plus à Bruxelles et de moins en moins à la Flandre». Il ajoute : (traduction libre) « si on accepte des listes bilingues à Bruxelles et si la distance s’accroît davantage entre les Bruxellois flamands et les Flamands de Flandre, il devient capital pour les partis flamands d’obtenir directement un droit d’ingérence à Bruxelles grâce à une forme de cogestion ». Il craint en effet que grâce à la présence de listes bilingues, les francophones pourraient, de fait, décider seuls quels « bons » Bruxellois flamands pourraient être ministres régionaux à Bruxelles. Les Flamands pourraient perdre ainsi leur influence dans cette Bruxelles dont ils ont tant besoin.

Dans le Soir du 10 septembre il ajoute : « La note de Di Rupo contenait aussi une réforme de la Région bruxelloise au détriment des communautés … C’est précisément ce que les Flamands ne veulent pas » et il poursuit « la position officielle du gouvernement flamand est qu’il doit y avoir une réforme de l’Etat sur base des deux Communautés. Cela signifie bien que la Région bruxelloise doit être plus faible qu’aujourd’hui. Je sais - reconnaissait-il - de plus en plus de Flamands bruxellois ne partagent plus cette idée. » Il propose donc que pour Bruxelles, « la législation de base resterait fédérale - alors que les deux autres régions auraient la liberté de légiférer -, seule son application se ferait par la Région bruxelloise. » Il termine son plaidoyer pour une cogestion de Bruxelles en disant : «Bruxelles est une île en Flandre et la façon dont elle est gérée est vitale pour toute la Flandre

Il suffit, ces revendications unilatérales sont intolérables. Les Bruxellois ont le droit légitime de prendre leur sort en main sans devoir rendre perpétuellement des comptes à ceux qui persistent à les maintenir dans un état de dépendance financière par les mécanismes d’une loi de financement inéquitable.

Bruxelles a également besoin du port d’Anvers pour recevoir des matières premières et expédier ses produits vers le monde. Les Bruxellois ont également besoin du poumon vert des Ardennes pour réparer les dégâts causés à leur santé par la pollution générée par les centaines de milliers de navetteurs qui les envahissent chaque jour. Est-ce pour cela que nous devons revendiquer un droit d’ingérence sur la gestion du port d’Anvers ou sur la manière dont sont gérées les forêts ardennaises. Ce serait ridicule.

De quoi a peur la Flandre ? Sans doute de se retrouver, seule, isolée et contrainte de se montrer ouverte, accueillante et respectueuse des régions qui l’entourent avec lesquelles elle devrait trouver des terrains d’entente pour garantir un développement harmonieux pour tous. La Flandre a-t-elle si peu confiance en elle qu’elle doive obtenir ses avantages par la force de compromis déséquilibrés ?
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