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Depuis quelques temps, je n'entends plus que ce mot dans toutes les bouches. C'est Sarkozy qui, le premier, par l'intermédiaire d'un des ses dévoués ministres qui lui doit tout, a lancé ce débat qui lui a très vite explosé à la figure. En effet, personne n'a été dupe un instant des (mauvaises) intentions (assez peu) cachées derrière cette tentative malheureuse de réhabiliter une France ethniquement pure, si tant est qu'elle l'eût jamais été. Et c'est d'ailleurs, j'en suis convaincu, ce qui fait sa force et sans doute sa grandeur.
Mais, trève d'épanchements sur les démangeaisons pseudo nationalistes de nos voisins du sud. Cette agitation outre Quiévrain a semble-t-il donné des idées à quelques uns de nos politiques en vue. C'est d'abord le grand Guy (Verhofstadt) qui s'en est pris, à juste titre, à cette mascarade pour mettre en avant le caractère multiculturel, voire plus, de notre monde d'aujourd'hui. Cette sortie courageuse lui fût vigoureusement reprochée par un expert en matière de nationalisme, le petit Bart (De Wever) qui en profita pour montrer que les griffes du lionceau sont toujours bien acérées et que celui qui voudrait le vérifier en serait pour ses frais. Jusque là, rien de bien nouveau.
On connaît la crainte d'une certaine France de se voir "envahir" par ses jeunes dont les parents sont venus d'ailleurs pour reconstruire leur pays après la dernière guerre. Ce sont ces jeunes qui leur paieront leur retraite mais, en attendant, la France bien-pensante préfère les voir traîner leur ennui ailleurs que sur les bancs du parc devant leur appartement.
Que les héritiers naturels du nationalisme flamand le plus virulent se fendent d'un plaidoyer pour réaffirmer haut et fort l'existence de la nation flamande et que, en passant, ils rappellent qu'on est mieux entre soi et qu'ils n'ont pas besoin du reste de cet Etat croupion qu'ils détestent, soit, on pouvait s'y attendre.
Mais ma surprise vint d'un autre côté. Ce bon Rudy (Demotte) si calme, si pondéré, si comme il faut, bien que socialiste - mais oui, il y en a des socialistes comme lui -a cru devoir, lui aussi, se jeter dans cette marre pour réclamer que l'on se penche sur l'identité wallonne, allant même jusqu'à réclamer que la Constitution officialise le nom même de Wallonie en lieu et place de la Région wallonne.
Mais qu'ont-ils donc ?
Et moi, né à Bruxelles, d'une mère wallonne, d'un père bruxellois, lui-même mi-wallon, par son père et mi-flamand par sa mère, ayant épousé une bruxelloise, parfaitement mi-wallonne par sa mère et mi-flamande par son père, qui suis-je ? Je me demande comment je dois calculer pour m'identifier à une culture dont on voudrait, naïvement, me faire croire que c'est la langue le critère essentiel de différenciation.
J'ai la faiblesse de croire, et je pense que c'est une force, qu'un individu, quel qu'il soit, a de multiples racines, appartient à de multiples cultures, est l'héritier de multiples patrimoines historiques. C'est tout cela qui fait son identité. Et donc, chaque identité est multiple. Aucune identité ne se résume ni à une langue, ni à une histoire, ni à une religion. La richesse extraordinaire de tout individu est cette diversité des sources, je devrais dire des ressources, qui font ce qu'il est, unique et non pas identique ou copie conforme, mais bien homme complet ayant hérité quelque chose de toutes ces influences multiples non seulement génétiques mais tout ce qu'il aura acquis par apprentissage, que ce soit celui de l'école ou celui de la rue.
Nous avons cette chance extraordinaire de vivre dans un pays, la Belgique, qui a été traversé par de multiples courants, qui, tous, nous ont façonnés. Bien sûr, croyants ou non, nous sommes tous baignés à la fois par la culture antique - grecque et latine - et par la tradition judéo-chrétienne. Bien sûr, les courants matérialistes du vingtième siècle nous ont aussi fortement influencés notamment par ce que, après avoir généreusement contribué à libérer nos pays, les américains ont exercé sur nous une attraction forte et ont profondément modifié notre façon de vivre. La mondialisation galopante et les importantes migrations de populations nous apportent d'autres influences et ce n'est qu'un début. L'Europe, qui péniblement se construit, nous montre chaque jour des aspects différents qui nous façonnent déjà.
L'identité, ou plutôt ce qui fait la personnalité d'un homme ne se résume pas à ce qu'il a de commun avec quelques uns, mais est le résultat de toutes les influences dont il aura su tirer ce qui lui était nécessaire pour se construire. C'est forcément multiple et c'est forcément différent pour chacun. Si j'ai un souhait à exprimer, c'est qu'on ne parle plus jamais d'identité, car dans le sens dans lequel on utilise ce mot, il divise, alors que l'on veut faire croire qu'il rapproche. A la rigueur, je pourrais encore l'utiliser pour désigner la carte sur laquelle un agent de la force publique, qui ne peut pas tout savoir de moi, pourra lire mon nom et ma date de naissance. Encore faut-il qu'il ne profite pas de cette information pour me coller "l'identité" qu'il lui plaira de me donner.
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